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S. Lavric :Motivation des arrêts d’assises : la chambre criminelle confirme sa jurisprudence

Le 30 juin 2011

Quelques semaines après la décision question prioritaire de constitutionnalité du Conseil constitutionnel, la chambre criminelle réaffirme, par deux arrêts du 15 juin 2011, la compatibilité du droit français avec les exigences européennes en matière de motivation des verdicts de condamnation.

Dans deux affaires concernant, pour la première, l’auteur d’un trafic de stupéfiants en bande organisée (pourvoi no 10-80.508) et, pour la seconde, le complice d’actes de terrorisme (pourvoi no 09-87.135), la chambre criminelle estime, par deux arrêts du 15 juin 2011, que la déclaration de culpabilité des deux accusés a été correctement motivée au regard des exigences conventionnelles et légales invoquées (Conv. EDH, art. 6 ; C. pr. pén., 348 et 349) dès lors que « sont reprises dans l’arrêt de condamnation les réponses qu’en leur intime conviction, les magistrats composant la cour d’assises d’appel spécialement composée, statuant dans la continuité des débats à vote secret et à la majorité, ont données aux questions sur la culpabilité posées conformément au dispositif de la décision de renvoi et soumises à la discussion des parties », et qu’« ont été assurés l’information préalable sur les charges fondant la décision de mise en accusation, le libre exercice des droits de la défense ainsi que le caractère public et contradictoire des débats ».

La haute cour réitère donc sa jurisprudence traditionnelle (V. pour les arrêts les plus récents, Crim. 14 oct. 2009, D. 2009. Jur. 2778, note J. Pradel  ; AJ pénal 2009. 495, étude J. Lasserre-Capdeville  ; 20 janv. 2010 [2 arrêts], Dalloz actualité, 26 févr.  et 3 mars 2010 , obs. C. Gayet ; 27 oct. 2010, ibid., 4 janv. 2011  ; V. égal. la pléthore de décisions QPC refusant le renvoi au Conseil constitutionnel, Crim. 19 mai 2010 [3 arrêts], Dalloz actualité, 1er juin 2010  ; 4 juin 2010 [7 arrêts], ibid., 9 juill. 2010, obs. L. Priou-Alibert ), postérieurement à la décision question prioritaire de constitutionnalité (QPC) par laquelle le Conseil constitutionnel a estimé conformes aux principes d’égalité devant la justice, de respect des droits de la défense et d’obligation de motiver les décisions de condamnation, les dispositions entourant le prononcé des verdicts d’assises (Cons. const., 1er avr. 2011, n° 2011-113/115-QPC, Dalloz actualité, 5 avr. 2011, obs. S. Lavric ). Pour arriver à cette conclusion, les Sages avaient détaillé l’ensemble des garanties prévues par la loi concernant l’audience (oralité et continuité des débats, droit à l’assistance d’un défenseur) et le délibéré.

La question de la conformité aux droits et libertés de la motivation « à la française » des arrêts d’assises avait émergé à la faveur de la remise en cause du système belge, par un arrêt rendu par la Cour européenne des droits de l’homme en 2009 (CEDH 13 janv. 2009, Taxquet c. Belgique, D. 2009. Jur. 1058, note J.-F. Renucci  ; RSC 2009. 657, obs. J.-P. Marguénaud  ; saisie de l’affaire, la grande chambre de la Cour de Strasbourg avait néanmoins décidé de ne pas imposer aux États-parties une motivation latu sensu des verdicts criminels (CEDH, Gde ch., 16 nov. 2010, no 926/05, Dalloz actualité, 25 nov. 2010, obs. O. Bachelet  ; D. 2011. Jur. 47, note J.-F. Renucci  ; ibid. 48, note J. Pradel  ; AJ pénal 2011. 35, obs. C. Renaud-Duparc ).

Il est intéressant aujourd’hui de noter que le projet de loi sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et le jugement des mineurs, présenté le 13 avril 2011 (V. Dalloz actualité, 18 avr. 2011, obs. E. Allain ) et adopté en première lecture, par le Sénat, le 19 mai (V. Dalloz actualité, 23 mai 2011, obs. E. Allain ), prévoit d’insérer dans le code de procédure pénale un article 365-1 qui imposerait au président de la cours d’assises ou à l’un de ses assesseurs d’énoncer les « principales raisons, qui pour chacun des faits reprochés à l’accusé, ont convaincu la cour d’assises ». La loi en devenir semble donc aller au-delà des exigences posées par le Conseil constitutionnel, la Cour européenne des droits de l’homme et la chambre criminelle. Dans cet esprit, la cour d’assises spéciale de Paris, statuant sur l’affaire Colonna, a très récemment jugé opportun de proposer une motivation de sa décision, sous la forme d’un texte de quatre pages entièrement rédigé et reprenant les divers éléments validant la participation de l’accusé à l’attaque de la gendarmerie de Pietrosella en qualité de guetteur et à l’assassinat du préfet Érignac en qualité de tireur.

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